Avez-vous déjà prononcé une phrase apparemment anodine qui a profondément blessé un proche bipolaire ? Selon les organismes de santé publique, le trouble bipolaire affecte des centaines de milliers de Français, pourtant beaucoup ignorent l’impact destructeur de certains mots. Alors que cette maladie neurobiologique génère déjà une sensibilité émotionnelle accrue, connaître les 10 choses à ne pas dire à un bipolaire devient essentiel pour transformer notre communication en véritable soutien bienveillant.
Ces phrases qui blessent : l’impact réel des mots sur les personnes bipolaires
Le trouble bipolaire affecte entre 680 000 et 1,36 million de personnes en France selon les estimations épidémiologiques basées sur une prévalence de 1 à 2% de la population. Dans un contexte où plus de la moitié des Français sont concernés par des troubles de santé mentale, ce trouble neurobiologique chronique nécessite une attention particulière.
À l’échelle mondiale, l’OMS estime qu’environ 40 millions de personnes (0,53% de la population mondiale) vivent avec un trouble bipolaire, en faisant la 6e cause mondiale de handicap selon les dernières données de l’OMS.
Quand on côtoie un proche concerné, certaines phrases peuvent paraître anodines mais créent en réalité des dommages profonds. Cette vigilance est d’autant plus cruciale que le trouble bipolaire présente le plus haut risque de suicide parmi les troubles psychiatriques – de l’ordre de 15% sur la vie entière, soit trente à soixante fois plus que la population générale.
Les personnes bipolaires vivent déjà avec une sensibilité émotionnelle accrue. Chaque phrase maladroite peut déclencher une spirale de culpabilité ou renforcer l’isolement social qu’elles ressentent souvent. Le diagnostic étant souvent tardif – posé après 9 ans en moyenne selon les données 2025 – ces personnes ont déjà enduré une longue période d’incompréhension.
Il faut également savoir que les périodes dépressives peuvent apparaître en premier dans environ 60% des cas, ce qui explique pourquoi le trouble est souvent mal diagnostiqué initialement et pourquoi certaines phrases sont particulièrement nuisibles pendant ces phases.
Les 10 phrases à bannir absolument de vos conversations
Voici une liste de phrase à ne jamais dire à un bipolaire afin de préserver de bonnes relations
1. « Tu n’as qu’à te ressaisir »
Cette phrase sous-entend que le trouble bipolaire relève d’un manque de volonté. C’est comme demander à quelqu’un avec une jambe cassée de « juste marcher normalement ». Le trouble bipolaire est une maladie neurobiologique chronique caractérisée par des changements d’humeur extrêmes qui nécessite un traitement médical approprié.
Alternative positive : « Je comprends que c’est difficile. Comment puis-je t’accompagner aujourd’hui ? Et si tu as des pensées qui t’effraient, n’hésite pas à en parler à ton psychiatre ou à appeler le 3114. »
2. « Tout le monde a des hauts et des bas »
Minimiser l’expérience vécue par la personne bipolaire revient à nier la réalité de sa souffrance. Les épisodes maniaques et dépressifs sont des états cliniques bien plus intenses que les variations d’humeur normales.
Alternative positive : « Ce que tu vis me semble vraiment intense. Peux-tu m’expliquer ce que tu ressens ? »
3. « Tu devrais arrêter tes médicaments, ils te changent »
Interrompre un traitement psychiatrique sans supervision médicale peut provoquer des rechutes graves. Cette phrase peut pousser la personne à prendre des décisions dangereuses pour sa santé mentale.
Alternative positive : « As-tu pu discuter de tes effets secondaires avec ton psychiatre ? »
4. « Tu es juste paresseux »
Pendant les phases dépressives, l’énergie et la motivation chutent drastiquement. Cette phrase culpabilise la personne et ignore la réalité neurobiologique de son état.
Alternative positive : « Je vois que tu traverses une période difficile. Quelles petites choses pourrais-je faire pour t’aider ? »
5. « Calme-toi, tu en fais trop »
Durant les épisodes maniaques, la personne peut effectivement paraître surexcitée, mais elle ne contrôle pas cet état. Cette phrase peut augmenter son agitation et son sentiment d’incompréhension.
Alternative positive : « Tu sembles avoir beaucoup d’énergie. Veux-tu qu’on en parle calmement ? »
Comment adapter votre communication selon les phases
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Phase du trouble |
Signes observables |
Communication adaptée |
À éviter absolument |
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Phase dépressive |
Fatigue, isolement, tristesse |
Patience, présence discrète, encouragements doux |
Pression, reproches sur l’inactivité |
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Phase maniaque |
Hyperactivité, euphorie, impulsivité |
Calme, structure, limites bienveillantes |
Confrontation directe, jugements |
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Phase stable |
Humeur équilibrée, fonctionnement normal |
Communication normale, projets raisonnables |
Rappels constants de la maladie |
Les phrases qui renforcent l’isolement social
Parmi les phrases à proscrire, il y a certaines qui accentuent l’isolement social du bipolaire. Voici leur liste !
6. « Tu ne penses qu’à toi »
Les symptômes bipolaires peuvent effectivement rendre la personne moins disponible pour les autres, mais ce n’est pas un choix égoïste. C’est une conséquence directe de la maladie qui demande déjà énormément d’énergie pour être gérée au quotidien.
7. « Tu exagères toujours tout »
Cette phrase invalide les émotions de la personne. Dans le trouble bipolaire, l’intensité émotionnelle est réellement amplifiée par les déséquilibres neurochimiques.
8. « Tu devrais être reconnaissant, d’autres ont pire »
Comparer la souffrance ne la diminue jamais. Chaque personne vit sa propre réalité avec ses propres défis. Cette phrase génère de la culpabilité supplémentaire.
Erreurs de communication selon le type de relation
Votre manière de communiquer doit s’adapter à la relation que vous entretenez. Si vous êtes le conjoint de la personne, évitez de lui dire qu’elle « gâche notre relation » et préférez plutôt une approche constructive en lui demandant « Comment peut-on traverser ça ensemble ? ». Pour les parents, la phrase à bannir est « On a raté ton éducation ». Il est plus sain de dire « On apprend ensemble à mieux comprendre ». Enfin, en tant qu’ami, au lieu de dire « Tu n’es plus comme avant », rassurez votre proche en lui affirmant que « Notre amitié reste importante pour moi ».
Récapitulatif :
Pour les conjoints :
- Évitez : « Tu gâches notre relation »
- Préférez : « Comment peut-on traverser ça ensemble ? »
Pour les parents :
- Évitez : « On a raté ton éducation »
- Préférez : « On apprend ensemble à mieux comprendre »
Pour les amis :
- Évitez : « Tu n’es plus comme avant »
- Préférez : « Notre amitié reste importante pour moi »
Les deux dernières phrases destructrices
Pour boucler la liste des phrases à proscrire de votre vocabulaire, faites attention à ces dernières !
9. « C’est juste dans ta tête »
Bien que le trouble bipolaire soit effectivement une maladie mentale, cette phrase minimise la réalité physique des symptômes. Les déséquilibres neurochimiques provoquent des sensations corporelles réelles.
10. « Tu vas finir à l’hôpital psychiatrique »
Brandir la menace de l’hospitalisation crée une peur supplémentaire. Cette phrase peut pousser la personne à cacher ses symptômes plutôt qu’à chercher de l’aide.
Quelques stratégies de communication bienveillante
Pour développer une communication positive, concentrez-vous sur ces approches :
- Écoutez sans juger : Laissez la personne exprimer ses ressentis
- Validez ses émotions : Reconnaissez la légitimité de son vécu
- Proposez votre soutien : Demandez concrètement comment aider
- Respectez ses limites : Acceptez qu’elle puisse avoir besoin d’espace
- Informez-vous sur la maladie : Comprenez mieux les mécanismes du trouble
- Évaluez le risque suicidaire : Soyez attentif aux signaux d’alarme et orientez vers une aide professionnelle
Besoin d’apprendre à mieux comprendre les bipolaires ? Voici quelques ressources professionnelles en France
Plusieurs organismes proposent un accompagnement spécialisé :
- UNAFAM : Association nationale de familles de malades psychiques
- Argos 2001 : Association d’entraide pour les troubles bipolaires
- Bipolarité France : Association spécialisée dans l’accompagnement
- Centres médico-psychologiques (CMP) : Consultations gratuites sur tout le territoire
- Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) : Aide aux démarches administratives
- 3114 : Numéro national de prévention du suicide (gratuit, 24h/24)
Une prise en charge multidisciplinaire combinant traitement médicamenteux, psychothérapie et soutien psychosocial est recommandée pour optimiser la qualité de vie des personnes concernées.
FAQ sur la bipolarité
Pour aller plus loin et lever les doutes, cette foire aux questions rassemble des informations claires et précises sur les aspects les plus méconnus de la bipolarité.
Comment reconnaître les premiers signes d’un épisode bipolaire chez un proche ?
Les signes avant-coureurs d’un épisode maniaque incluent une diminution du besoin de sommeil (moins de 4 heures sans fatigue), une augmentation soudaine de l’activité, des projets grandioses irréalistes, des achats compulsifs ou une désinhibition sociale. Pour un épisode dépressif, surveillez l’isolement progressif, la perte d’intérêt pour les activités habituelles, les troubles du sommeil et de l’appétit, ou des propos pessimistes récurrents. Identifier ces signaux précoces permet d’adapter votre communication et d’encourager une consultation médicale rapide.
Que faire concrètement lors d’une crise bipolaire aiguë ?
En cas de crise maniaque, restez calme, évitez la confrontation directe, retirez les moyens de paiement si possible, et contactez l’équipe soignante ou le psychiatre traitant. Si la personne présente un danger pour elle-même ou autrui, appelez le 15 ou le 3114. Durant une crise dépressive sévère avec idées suicidaires, ne laissez jamais la personne seule, retirez les moyens potentiellement dangereux, et orientez immédiatement vers les urgences psychiatriques ou appelez le 3114.
Quelles sont les différences entre trouble bipolaire de type 1 et de type 2 ?
Le trouble bipolaire de type 1 se caractérise par au moins un épisode maniaque franc durant plus de 7 jours (ou nécessitant une hospitalisation), souvent suivi d’épisodes dépressifs majeurs. Le type 2 présente des épisodes hypomaniaques moins intenses (4 jours minimum) alternant avec des épisodes dépressifs majeurs plus fréquents et prolongés. Cette distinction est cruciale car elle influence l’approche thérapeutique et la communication : les personnes avec un type 2 sont souvent sous-diagnostiquées et peuvent se sentir incomprises.
Comment expliquer le trouble bipolaire aux enfants de la famille ?
Adaptez le langage selon l’âge : pour les plus jeunes (6-10 ans), expliquez que « papa/maman a une maladie du cerveau qui change parfois ses émotions, comme quand on a de la fièvre ». Pour les adolescents, abordez les aspects neurobiologiques simplement et rassurez-les sur le fait qu’ils ne sont pas responsables. Insistez sur la constance de l’amour parental malgré la maladie, établissez des codes familiaux pour identifier les phases difficiles, et n’hésitez pas à consulter un psychologue spécialisé en thérapie familiale.
Peut-on prévenir les rechutes bipolaires et comment s’y préparer ?
La prévention repose sur l’observance médicamenteuse, la régularité des rythmes de vie (sommeil, repas, activité physique), l’évitement des facteurs déclenchants (stress intense, alcool, drogues), et le suivi psychiatrique régulier. Établissez avec votre proche un « plan de crise » écrit incluant les signes d’alerte personnalisés, les contacts médicaux d’urgence, et les stratégies d’intervention précoce. La psychoéducation familiale et les thérapies cognitivo-comportementales réduisent significativement le risque de rechute selon les études cliniques récentes.


